De Nathalie Hilt - Libraire - Poétesse - Voyageuse
J'accompagnais mon conjoint dans son parcours de traitement en chimiothérapie. Après une récidive dépassée avec succès, la seconde fut plus brutale. Et dans cette fin de vie qui s'annonçait, il était pour lui de plus en plus compliqué de tenir debout, de marcher ou de s'alimenter. Bientôt, plus rien ne le soulageait plus. La souffrance était omniprésente et le seul apaisement venait de mon toucher. Pas de massages – son corps ne pouvait le supporter – pas de caresses non plus – sa peau était devenue trop fragile – juste un toucher délicat, une main légère et sensible, une vitale présence et la chaleur bienfaisante qui circulait de ma main à son corps.
Et si, à d'autres moments de ma vie, ce simple geste offert,avec conscience et douceur, avait déjà soulagé, réchauffé, soutenu sans porter, à ce moment là, je ne pensais qu'au simple fait d'être aux côtés d'un être en souffrance et de lui apporter le seul réconfort qui était à ma portée.
C'est seulement quelques mois plus tard, alors que j'aidais une amie qui souffrait du dos, qu'elle mis la lumière sur la teneur de mes gestes en me disant : "as-tu déjà envisagé d'en faire quelque-chose de ce« fluide » particulier dans tes mains ?"
Mais il n'était pas question pour moi de devenir thérapeute, masseuse, ou d'entrer dans un cursus de soignante. Telle n'était pas ma voie. Pourtant, je savais pertinemment qu'il se produisait quelque chose de bien réel et de très particulier par et au-delà de mes gestes. Je sentais mes mains chaleureuses, enveloppantes, accompagnantes et je percevais ce dont le corps avait besoin – comme si certains endroits appelaient, voulaient communiquer ou être soulagés -. On pouvait me dire « j'ai mal à l'épaule » et pourtant, mes mains étaient attirées par la nuque ou le haut du dos...
Et systématiquement c'était juste, ce qui me surprenait toujours ! J'ai donc voulu en savoir plus !
Et c'est là que, par la magie de l'univers, j'ai rencontré une praticienne de la méthode Rosen. En partageant mes expériences, elle m'a confirmé une similitude avec ce qu'elle pouvait vivre et me proposa de découvrir ce soin tel qu'elle le pratiquait. En confiance, j'ai dit oui, et en quelques minutes, j'ai reconnu cette attention particulière offerte à mon être, cette délicatesse et cette écoute d'une expression des maux sans chercher forcément des mots.
Ce fut d'abord une épreuve pour moi, car j'acceptais d'entendre que, depuis longtemps, mon corps cherchait à me parler de mes souffrances endurées et refoulées – notamment en lien avec le deuil – et que je l'avais tout simplement fait taire. Alors je suis entrée dans une session de découverte de cette pratique en m'inscrivant à plusieurs stages qui permettent de « donner » et de « recevoir » parcourant ainsi un chemin très personnel tout en participant à une entraide d'une grande richesse.
Accueillie avec beaucoup de prévenance, j'ai appris à être touchée, à accepter le processus lorsque montait « à la surface » de mon corps – et de celui des autres - des douleurs ou des émotions. J'ai pu mieux comprendre comment le toucher pouvait « parler », à sa façon,aidant le corps à délivrer des messages – parfois intimes - qu'il n'est pas toujours aisé de formuler...
Dans notre société occidentale, le toucher est tabou, tout comme le deuil d'ailleurs, et pourtant l'un comme l'autre sont universels. L'intimité amicale - un simple contact sur le bras ou une caresse sur la joue - est aujourd'hui tellement connoté sexuellement que l'on n'ose plus se frôler ou se donner la main, ce qui est profondément inhumain.
Grâce à la méthode de Marion Rosen, j'ai redécouvert ce langage sacré et l'aide précieuse que le contact attentionné, précis et patient offre à chacun – à tous les âges de la vie et pour toutes les étapes importantes de l'existence. Une main peut tout dire et tout entendre !
Je n'ai pas souhaité poursuivre le cursus car j'ai développé d'autres projets créatifs. Cependant, la méthode Rosen garde une belle place en moi et je suis heureuse d'avoir eu l'opportunité de connaître cette pratique, au bon moment. Mon cœur est plein de gratitude pour les personnes qui m'ont accompagnées sur cette partie de mon chemin de guérison, et de Vie.
Nathalie Hilt